Interview Japan Vibes

Peux-tu te présenter brièvement ?

Jonathan Pavius, je suis le rédacteur en chef de Japan Vibes...

Et ton signe astral (important pour les animefans la mythologie) ?

Lion.

Question classique et incontournable : quand, comment, pourquoi Japan Vibes ? Passion ou bizness ?

Le premier numéro

Les principales personnes qui ont participé à la création de la société ont toutes eu des parcours professionnels séparés et en dehors du milieu de la presse spécialisée. A la base il y a la volonté de chacun de changer d’activité : d’arrêter pour l’un de travailler dans la gestion d’un commerce, pour un autre de sortir du cycle des examens... On s’est donc tous réuni avec la même volonté de faire quelque chose autour de notre passion commune pour le Japon. Certains sont particulièrement attirés par l’animation et le manga, d’autres par le cinéma, d’autres encore par les jeux vidéo ou la musique. Ce n’est donc pas par « opportunisme » ou suite à des échecs dans nos vies professionnelles que nous nous sommes retrouvés à monter ce magazine.

C’était donc d’autant plus une prise de risque au départ que vous avez tous lâché des situations établies pour vous lancer dans la presse...

Effectivement. On ne savait absolument pas comment allait être reçu le premier numéro de Japan Vibes et à dire vrai nous étions plutôt persuadés de nous planter. Il y avait non seulement le fait que nous débutions, mais surtout l’existence d’un marché de la presse spécialisée anime/manga déjà très actif. A l’époque il fallait déjà compter avec les magazines FJM, Coyote Mag, Japan Mania... et bien entendu l’incontournable Animeland. Donc compte tenu de cette situation nous sommes aujourd’hui plutôt satisfait.

Comment s’est constituée l’équipe dans ces conditions ?

Et bien à mesure que les bons résultats de vente se confirmaient nous avons salarié le personnel nécessaire au bon fonctionnement de la boîte.

Et est-ce que votre ligne éditoriale, à savoir pour faire simple un mélange anime/manga/pop culture japonaise, a été définie dès le début ?

Notre réflexion nous a emmené à nous dire que pour parler de la culture japonaise tout en intéressant le plus grand nombre il fallait passer par les cases anime/manga. Tous les autres titres (sauf feu Japan Mania), à l’époque, se focalisaient sur l’anime. Nous pensions donc pouvoir faire quelque chose sur cet aspect culturel et ça marche plutôt pas mal. D’ailleurs ça semble avoir donné des idées à d’autres comme Kogaru ou Baka...

Quel type de lectorat touchez-vous ?

On touche une tranche d’âge qui se situe, grosso modo, entre 15 et 25 ans. Je ne pense pas qu’on ait beaucoup de lecteurs de plus de 25 ans... mais bon il doit y en avoir quelques uns quand même... (rire). Mais bon pas tant que ça. Nous avons déjà fait des sondages qui nous donnaient, si je me souviens bien, une proportion de 40% de filles et 60% de garçons. Mais bon ce sont des chiffres basés sur un sondage ne touchant pas plus de 1000 personnes...

Les sondages IPSOS n’ont pas forcément d’échantillon de population plus significatif pour baser leurs « projections »...
Donc à ce niveau là on sait où on en est. D’ailleurs ça se vérifie sur les salons également où les lecteurs qu’on rencontre, lorsqu’ils passent au stand, correspondent aux caractéristiques du sondage.
Comment travaillez-vous avec le Japon ?
Nous avons un correspondant permanent au Japon qui s’occupe principalement d’alimenter le magazine en articles « tranches de vie ». Il va interviewer des commerçants, des jeunes, des étudiants... Pour ce qui est des contacts avec les professionnels nous construisons un « réseau » aussi bien dans le milieu de l’animation que dans celui du manga et de la musique...
Nous en sommes au numéro 6 de Japan Vibes qui est un bimestriel, vous n’avez pas le projet de passer mensuel ?

Nous attendons. On fait des tests. Si on doit le faire alors ce sera probablement aux alentours de fin 2003, début 2004. Disons qu’en ce moment nous avons peut-être d’autres projets et on ne voudrait pas aller « plus vite que la musique »... Donc ça sera fait mais en son temps.

Après 6 numéros de Japan Vibes, donc une année d’existence, quel premier bilan peux-tu tirer ?

En un an d’existence nous avons constaté que la venue de titres concurrents ne nous a pas fait perdre de lecteurs. Bien au contraire, nous augmentons sensiblement nos chiffres à chaque numéro, entre 500 et 1000 ventes supplémentaire. Bon on va bien finir par s’arrêter mais pour l’instant on peut dire que ça marche plutôt bien. Nous avons un panel de rédacteurs qui s’élargi, des critiques de plus en plus constructives... Donc un bilan positif et on touche du bois.

Le numéro 7
Comment juges-tu l’état du marché de l’animation et du manga en France ? Est-ce qu’on peut encore parler de phénomène de mode ? Ne risque t-on pas une saturation ?
C’est à mon avis plus qu’une mode. C’est un phénomène culturel à part entière qui n’a pas forcément toujours eu bonne presse. En tous les cas ce n’est pas passager. Beaucoup de ceux qui à 13 ou 14 ans lisent du manga en liront encore à 25 ans, comme moi. Concernant les magazines spécialisés c’est sûr que ça commence à faire pas mal de titres sur les linéaires... On ne peut pas tenir à 50 sur ce marché, comme l’atteste malheureusement le cas Japan Mania, que j’aimais bien. Mais pour ce qui est de Japan Vibes on ne craint pas trop pour le moment. Notre base de lecteurs est plutôt constante et ne varie pas vraiment d’un numéro sur l’autre. Notre lectorat est fidèle dans la mesure où il ne baisse pas. Par contre du point de vue de l’édition de manga et autres, c’est sûr que vu les politiques d’éditions intensives il y aura des « morts ». Le public actuel ne peut pas absorber 45 nouveautés manga par mois, sans compter la dizaine et plus de magazines spécialisées...
Vous arrive t-il de tenir compte de la concurrence pour élaborer votre contenu éditorial ?
Non. C’est surtout par rapport à nos propres exigences et celles des lecteurs que nous réagissons. C’est en apportant quelque chose de différent qu’un magazine peut espérer fonctionner, sinon on en serait tous à copier Animeland qui reste le magazine numéro 1.
Comment définirais-tu les particularités de ton magazine ?

Notre particularité viendrait peut-être de la façon dont s’est élaborée notre équipe. A savoir que ce sont les centres d’intérêts de chacun qui ont définit le contenu de Japan Vibes. Si aujourd’hui d’autres magazines se lancent dans la chronique de musique japonaise c’est aussi en partie parce que nous avons démontré la viabilité d’un tel contenu. Mais disons que là où ce magazine ira chercher les personnes ayant les connaissances pour en parler, Japan Vibes procède d’une logique inverse : c’est parce qu’il y avait dans l’équipe des gens que ça intéressait que nous en avons parlé.

Est ce que vous avez des projets de travail autour de votre site Internet ?

Non. On n'a pas vraiment le temps vu l’investissement que suppose la création d’un site digne de ce nom et on voudrait pas faire n’importe quoi... On préfère se concentrer pour l’instant sur le magazine. En plus il y a aussi quelques autres projets presse qui risquent de nous mobiliser pendant encore un temps.

Japan Vibes organise des voyages au Japon, pour quelle raison et est-ce que ça marche ?

C’est vrai que nous sommes les seuls à proposer ce type d’activité. Donc déjà ça nous fait de la pub (rire). Tout le monde est au courant qu’on fait des voyages : la concurrence, les éditeurs... On est quand même assez fier d’avoir été les premiers à proposer ça, tout comme on a été les premiers à donner une grande part à la culture japonaise dans nos pages. Et oui ces voyages marchent. Tous les inscrits qui se déclarent ne partent pas tous, c’est sûr, mais il y en assez pour que le système tourne.

Et quelles sont les conditions d’organisation du voyage ?

Toutes les réponses sont sur le site de Japan Vibes. Je peux juste préciser que cette année il y a au programme la visite de l’école de Toeï Animation, avec la possibilité de faire un petit stage accompagné de profs... Ce sera quelque chose d’assez sympathique et puis on a développé de bons contacts avec la Toeï. Voilà le petit plus que nous proposons pour ce voyage de neuf jours.

Et pour le futur, d’autres projets ?

Et bien en ce qui concerne les mangas on a le projet de lancer une publication plus essentiellement axée sur eux, en particulier du point de vue des sorties en France. Sinon d’autres projets oui, mais ça ne concerne pas vraiment le Japon.

date
  • juin 2003
crédits
Interviews