Cas d'école
Il y a quatre ans, le second long-métrage d'un jeune réalisateur inconnu, "Stranger of mine" enthousiasmait le tout public du circuit festivalier mondial (dont celui du Festival Asiatique de Lyon). Petit film sans prétention, il étonnait par son scénario à tiroirs multiples finement ciselé et un rythme soutenu peu courant dans l'actuel cinéma japonais.
La barre était donc relativement haute et les espoirs forts pour découvrir le nouveau film d'Uchida Kenji…et l'on peut parler de semi-réussite (plutôt que semi-échec).
Une nouvelle fois, le scénario (élaboré sur quatre ans en étroite collaboration avec les acteurs pour préparer leur jeu au mieux et entourer l'entière intrigue d'un épais voile de mystère) est extrêmement habile. Pas un temps mort pour un succédané de scènes absolument IM-PO-SSIBLE à deviner à l'avance. Il ne faut surtout pas décrocher pour ne pas rater le moindre détail d'importance capitale pour la suite de l'enquête. Les éventements se font et défont, aucun des personnages n'est vraiment ce qu'il paraît être et chaque nouvelle certitude du spectateur sera immanquablement ébranlée la scène d'après. Un peu laborieux à la longue, quelques incohérences scénaristiques (minimes !), mais un pur bonheur pour celui, qui acceptera de se laisser guider par l'esprit tortueux d'un réalisateur en pleine maîtrise de son art…et surtout, qui a vraiment bûché son sujet à fond.
Seul bémol: les personnages quelque peu distants en raison de leur façon particulière de se voiler la face et de leur caractère "insaisissable": on se sentira forcément floué, berné et quelque part déçu par les différents personnages; impossible de s'identifier à aucun d'entre eux, puisqu'on ne peut pas leur faire confiance – jusque dans l'ultime révélation finale.
Un film un peu à l'instar d'un bon polar à suspense bien ficelé, du temps où les auteurs pensaient encore leurs scénarii pendant des années pour déjouer la vigilance de leurs lecteurs – et non pas comme aujourd'hui, lorsque la plupart sont écrits à la chaîne, en reposant sur des intrigues déjà pensées avant eux ou des coups de théâtre totalement téléphonés.
Un réalisateur à suivre, sans aucun doute !
