Astec | 4.25 | Chaînon manquant ? |
A l’origine les histoires qui constituent ce GITS 1.5 étaient destinées à devenir GITS 2 Man Machine Interface. Nous savons ce qu’il en a finalement été, alors que tous attendaient, fin 98, la sortie en volume relié de GITS 2 en croyant y retrouver les chapitres déjà prépubliés, c’est un tout autre manga qui verra finalement le jour.
Ce n’est qu’en 2003 que sont compilés en un seul volume de 184 pages ces quelques chapitres laissés de côté et qui nous occupent ici. Le style graphique s’inscrit dans l’immédiate continuité du premier GITS, avec seulement quelques pages couleurs “à l’ancienne” en compaison des derniers travaux de SHIROW et tout le reste en noir et blanc. Idem pour la narration : dans GITS 1.5 nous sommes encore loin de la narration schizophrénique de GITS 2 Man Machine Interface et même si le mangaka y fait preuve de sa complexité coutumière, cela reste une complexité “normale”. Le récit reprend ainsi le schéma scénarisitique de la première partie de GITS, avant l’entrée en scène du Marionnettiste, lorsque SHIROW s’attachait à décrire le quotidien du travail de la Section 9 à travers diverses enquêtes en nous donnant également l’occasion de plonger plus profondément dans son univers. Seules nouveautés notables, l’introduction du personnage d’Azuma, un nouveau membre de la Section 9 et celle plus discrète de Proto, une recrue formée par Batou. Bien que Motoko apparaisse au détour des chapitres elle n’est donc clairement pas au centre des évènements et le lecteur espérant trouver dans GITS 1.5 le chaînon manquant avec MMI en sera pour ses frais, même si certaines indications y sont disséminées et que la « storyline » de GITS 1.5 s’insère complètement dans l’univers d’ensemble. C’est d’ailleurs la première hstoire de ce manga, Fat Cat, qui entretient le plus de liens directs avec les évènements narrés dans GITS 2 MMI. Selon les propos de SHIROW lui-même disponibles en fin de volume, « Voilà l’histoire qu’il y a derrière Ghost in the Shell 2, une partie de la guerre de vol d’information qui se développe entre Motoko et Motoko. Si on la lit indépendemment ça peut donner l’impression d’être peu développé mais j’aimerai que vous puissiez le remarquer dans la scène ou la jeune fille sort en courant dans la rue à toute vitesse. »
SHIROW fait référence dans cette scène de la premièr histoire à un personnage qui se fait hacker le cyber-cerveau (devinez par qui ?) mais dont l’état n’est pas pointé du doigt par le mangaka. Il laisse le soin au lecteur d’en décrypter la nature : on voit le personnage agir selon un schéma inattendu mais sans savoir qu’il est hacké et ce n’est qu’après relecture et synthèse d’autres évènements/dialogues de l’histoire qu’on déduit avec certitude la chose. Une narration « en creux » dont est coutumier le mangaka et qui donne toute sa densité à sa façon de construire ses récits, mais rend également ces derniers ardus à « domestiquer » ; un plaisir pour qui va au bout, une torture pour qui n’en voit pas le bout... Plus tard dans le récit d’autres informations distillées au compte-goutte viendront enrichir – et confirmer tout commes les quelques mots cités ci-dessus – le tableau de GITS 2 MMI. Comme la confirmation directe de l’existence, comme produit de la fusion du Major avec le Marionnettiste, d’au moins une autre Motoko, une copie/progéniture qui suit une logique propre...
Ainsi, malgré son aspect à priori “collage” tardif, GITS 1.5 présente une réelle continuité tout en approfondissant l’univers de la Section 9 sans le Major. Et puis surtout ce manga ne finit pas en laissant le lecteur “en plan” puisque les différentes enquêtes proposées trouvent leurs résolutions. On aurait aimé avoir plus de chapitres, une plus grande proximité avec le récit de GITS 2 MMI et l’auteur lui-même avoue qu’il avait en réserve une vingtaine d’histoires concernant la Section 9, mais pour partie certaines ont été abandonnées tandis que d’autres étaient réutilisées comme matière pour les séries TV produites par Production IG. Plus qu’a attendre un éventuel GITS 2.5 ou une méta compilation nommée GITS 3,14 pour espérer retrouver toutes ces histoires sur un support papier. Il reste ques les amateurs de SHIROW qui se plaignent habituellement de la faible production de ce dernier en matière de manga tourveront dans ce nouveau vieux GITS de quoi adoucir leur frustration. Et puis le style graphique tout comme la narration, plus proches du premier manga GITS, feront probablement le bonheur de ceux qui regrettaient un peu la qualité de son travail en noir & blanc.
Il ne manque plus qu’une édition française digne de ce nom, avec ou sans le E-Manga (le CD-rom vendu avec GITS 1.5 qui propose le manga en format électronique, une expérience de lecture intéressante mais dispensable), pour que les non japonisant et les non hispanisant puissent enfin goûter à ce GITS « mineur » mais indispensable et tout aussi passionant que les autres.