Ne serait-ce qu'en tant que très rare représentant du cinéma coréen d'avant la guerre, ce film vaut la peine d'être vu. En effet, quand ce n'est pas les bombardements, c'est le manque de soin à la conservation qui a pratiquement entièrement détruit les bobines de l'époque. Celui-ci a pu être sauvé grâce à un échange de films effectué avec la France, où il a pu être préservé des dégâts du temps. Un peu ironique quand on sait qu'il s'agit d'un film dont le sujet est le bouddhisme, qu'il expose d'ailleurs sous un jour par particulièrement flatteur. Pour la petite histoire, sachez qu'il s'agit du seul film de Yun Yong-gyu, puisque celui-ci s'est enfuit quelques années plus tard vers le Nord.
Do-song est un jeune garçon abandonné par sa mère dans un temple perdu dans la montagne. Son entourage continue à lui parler de sa mère, ce qui l'a maintenu très attaché à elle et il garde encore l'espoir qu'elle revienne un jour pour l'emmener avec elle à Seoul. Mais un jour, une famille vient honorer le décès de leur jeune fils. La mère de cet enfant commence à s'attacher à Do-song, et lui retrouve en elle la possibilité d'avoir enfin une mère, mais aussi de pouvoir découvrir Seoul. Celle-ci est prête à l'adopter, lorsqu'une autre femme arrive au temple...
L'histoire, réduite à sa plus simple expression, va donc droit vers l'essentiel, et le long-métrage ne dépasse donc pas les 90 minutes. A travers les yeux de l'enfant, on perçoit à quel point les règles de la vie monastique sont complètement inadaptées pour un orphelin. Si le mot d'ordre du bouddhisme est de se détacher de tout désir et attache personnels, Do-song ne peut qu'espérer revoir sa mère et découvrir Seoul, ville pleine de promesses matérielles. Et on le comprend, il est bien trop jeune pour comprendre et adopter une philosophie qui va complètement à l'encontre de sa nature. C'est également ceci qui le fera tant souffrir, et qui le poussera à quitter le temple pour un voyage solitaire, en se mettant à dos le prêtre par la même occasion. Est-ce que c'est dû au regard contemporain ? Il semble bien que l'ordre monastique soit bien critiqué, en prouvant qu'il ne peut pas aider toutes les âmes et qu'il abuse parfois de son autorité. Les rôles sont plutôt bien interprétés et rendent le tout crédible. La scène qui m'a le plus marqué survient lorsque Do-song, la mère du jeune défunt et la véritable mère de Do-song – qui garde secrète son identité – discutent dans une pièce, avec toute la tension que peut apporter cette situation.
C'est quand même une chance qu'un des plus anciens films coréens jamais retrouvés soit d'aussi bonne qualité. Malgré sa forme classique et une histoire assez simple, il demeure un film marquant de la cinématographie sud-coréenne.