La chasse au trésor
Seconde collaboration entre YAMADA Shoji et Hiroshi TODA, l'histoire entre l'acteur amateur et le réalisateur est particulière. Tout comme le réalisateur, le vieil homme avait voulu faire carrière dans le cinéma, vocation que ses parents lui avaient interdit de suivre en raison de la mauvaise réputation du milieu. Il avait donc emprunt une voie plus "traditionnelle" pour ne pas offusquer sa famille avant de devenir – bien plus tard – projectionniste dans un cinéma pour assouvir une partie de son rêve de jeunesse. Au moment de la sortie des premiers films de TODA dans sa ville natale de Fukui, YAMADA en avait suivi la couverture médiatique. Il avait immédiatement contacté le cinéaste pour lui proposer d'apparaître dans une de ses prochaines productions. N'ayant pas de rôle spécifique dans l’immédiat à lui proposer, TODA lui promettait de le rappeler plus tard. Par la suite, les deux hommes s'étaient perdus de vue, TODA déménageant à Kyoto, puis mettant sa "carrière" de réalisateur entre parenthèses devenant le gérant d'une clinique privée. Ce n'est qu'au moment de la préparation de Snow in Spring, que le réalisateur se rappela de l'homme et lui a proposa le rôle du vieillard sénile. Autant satisfait de leur collaboration sur un plan privé que "professionnel", TODA lui proposait d'enchaîner par It will be heaven tomorrow suivi bientôt par September Steps. Il n'est donc pas surprenant de trouver bon nombre d'éléments autobiographiques dans le personnage du vieil projectionniste, racontant la propre histoire de sa vie au frère dérangé de sa collègue; un jeune homme qui raconte – à son tour – une part autobiographique de TODA – mais se défend plus tard qu'il ne s'agissait là que de mensonges ! Une raison de plus pour voir en ce film une œuvre assez personnelle du réalisateur, dont la mince intrigue abracadabrante ne serait que prétexte pour faire le point sur sa carrière "cinématographique".
Toujours dans la droite lignée de son "renouveau" depuis 6 Jizo, It will be heaven tomorrow est un autre long métrage au scénario particulièrement travaillé. Moins une incursion dans un genre donné, TODA renoue avec ses anciennes thématiques en se focalisant – dans un premier temps – sur la rencontre fortuite entre le vieil projectionniste et le frère dérangé squattant l'appartement de sa sœur. Sa déficience mentale évoque les personnages décalés de For me and my ga" et Wayajan, tout comme la rencontre fortuite entre les deux hommes; leur relation père-fils évoque quant à elle la journée entre la femme et la petite fille de Summer Park. La comparaison s'arrêtera là, TODA abandonnant totalement le développement de la relation entre eux dans une seconde partie qui va davantage s'apparenter à la séquence onirique de son précédent Snow in spring. Se passant dans le même lieu (une maison au fin fond des bois), l'intrusion des cambrioleurs armés d'une épée renvoie directement à la tentative d'homicide de son précédent métrage. Quant au déchaînement de violence, il rappelle celui contenu dans "6 Jizo"; le procédé de tourner les séquences d'homicide en Noir et Blanc étant justifié par le réalisateur comme la représentation qu'il aurait en se tenant devant le lit de mort de certains de ses patients. It will be heaven tomorrow ressemble à un condensé de toute la filmographie passée du réalisateur; une intéressante entreprise de remise à plat au lendemain du succès d'estime de Snow in Spring – comme si le réalisateur avait voulu enchaîner par un best-of à l'attention d'un nouveau public conquis. Sauf que derrière une intention louable se cache une réussite bien moindre, a trop vouloir se disperser, TODA échoue à donner une cohérence à son ensemble. Trop de sujets sont abordés sans réellement être approfondis (la relation père-fils entre le projectionniste et le frère dérangé; la difficile condition sociale du vieil homme; le surréalisme de la sœur alitée; les intentions des cambrioleurs). Apparaissant comme par enchantement, les personnages des voleurs sonnent faux et ne parviennent à aucun moment à créer un sentiment de réel danger. Quant au dénouement, il est bien trop simpliste pour totalement convaincre – et indigne de la créativité du réalisateur que l’on a connu plus original.
TODA dit avoir voulu exploiter les nouveaux moyens de montage grâce à l'utilisation du numérique; il avait donc en partie écrit le scénario pour entremêler habilement rêve et réalité, déconstruire la partie narrative. Jamais pourtant il n'arrivera à illustrer ses louables intentions par son intrigue confuse et rédhibitoire. Comme conscient de sa propre faiblesse, il a d'ailleurs édité deux versions, ramenant la version originale de 70 mn à 45 mn. Dommage, car les rôles sont interprétés avec talent par les comédiens et la situation de départ était réellement intrigante. TODA innove au niveau de sa mise en scène en déconstruisant l'histoire. De nombreux flash-back et inserts temporels ne se dévoilent qu'au fur et à mesure du film. Las, TODA rate pour la première fois le coche !
RETROUVEZ UN PORTRAIT ET LA FILMOGRAPHIE COMPLETS DU REALISATEUR SOUS :
EIGAGOGO !!!