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Chaos

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Chris 4 Efficace et virtuose
Ordell Robbie 3 La confirmation d'un (petit) talent d'artisan de la série B
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Efficace et virtuose

Dès les premières minutes, lors de la disparition, on sent quelque chose de bizarre. Quelque chose cloche et on ne sait pas quoi. Dès l'intervention des policiers avec leurs dispositifs d'écoute, leurs conseils et compagnie, on a l'impression d'assister à un remake basique de Entre le ciel et l'enfer. Puis, tout bascule. Tout est chamboulé. Très vite la construction narrative s'avère au moins aussi frappée que le fameux Memento. Le spectateur a donc vite intérêt à repositionner ses repères pour ne pas être totalement perdu.

D'une banale histoire d'enlèvement de départ, vue et archi-revue, le récit vire non pas à un exercice de style - ce serait trop simple -, mais plutôt à un puzzle monstrueusement pervers et surtout terriblement bien pensé. Ring du même Hideo Nakata suggérait une terreur tangible avec des effets intangibles. Chaos prend le contre-pied et avec une construction cinématographique parfaitement maîtrisée et totalement tangible et matérielle, enrichit un matériau de base qui sur le papier ne devait pas présager ce tour de force final. Et c'est là toute la spécificité d'un auteur : transcender le travail fait en amont et en livrer une version hautement personnelle.

Des trois personnages principaux, qui est le plus pervers ? Interprétés par des acteurs particulièrement bien dirigés, ce ballet morbide n'a de cesse d'interpeler le spectateur d'une manière plus roublarde et subtile que ne peuvent le faire les thrillers occidentaux contemporains. Même le Memento de Chris Nolan auquel il est souvent comparé ne va pas aussi loin dans la construction/déconstruction. D'une part il suffit de le regarder à l'envers pour voir un film "normal", d'autre part, il est surtout vu du point de vue d'un personnage. Ici, tout est démultiplié, tout est si fortement imbriqué qu'il faudrait remonter entièrement le film, voire retourner des séquences entières pour avoir un yes-man-movie (ie un film de John Woo). De plus, tout n'est pas dit et une part importante du récit est à deviner voire ressentir : sans tomber dans les astuces amusantes et repiquées à la Tell me something, Hideo Nakata appuie les poses et les regards à travers une réalisation formelle aux premiers abords très neutre et anti-personnelle (voire téléfilm) mais finalement efficacement adaptée et d'une perversité absolue.

N'oublions pas le travail monumental de Kawai Kenji (pléonasme) qui joue ici un rôle illustratif très efficace même si moins marqué que dans d'autres métrages. Parfaitement malsain, ce chaos est donc autrement plus destructeur que celui de Coline Serreau (rien à voir mais bon...) mais surtout, il confirme la puissance du tandem Hideo Nakata/Kenji Kawai. Contrairement à d'autres équipes (expatriées pour la plupart), on peut raisonnablement penser que le meilleur est loin d'être derrière eux mais est surtout à venir. Rassurant et excitant.



28 avril 2002
par Chris




La confirmation d'un (petit) talent d'artisan de la série B

Chaos commence plutot bien, pas aussi bien que Ring, mais en se distinguant du tout-venant de la série B. Suite à un travelling virtuose dans un restaurant se posant sur un couple qui semble s’ennuyer, le film bifurque sur une annonce de kidnapping avec chantage téléphonique évoquant sur un mode mineur Entre le ciel et l'enfer(parce qu’ici on est dans un cinéma purement narratif qui ne débouche pas sur une description du monde de l’entreprise japonaise comme chez l’Empereur du cinéma mondial). On retrouve également l’art des plans contemplatifs et le travail sonore bien exécuté de Ring et un score de Kawai Kenji oeuvrant cette fois-çi dans les synthés atmosphériques avec une rythmique judicieuse. SPOILERS Le seul hic est que la pseudo-révélation rapide des responsables du complot nuit à la dramatisation du récit ce qui fait que l’on a un moment de flottement du récit. FIN SPOILERS Surtout, Ring réussissait au moins à effrayer dès son début ce qui n’est pas le cas ici.

Mais à la quarantième minute, un coup de théâtre va faire basculer le film. SPOILERS Un des comploteurs va voir dans la rue un visage lui rappelant la défunte kidnappée. FIN SPOILERS Le film va suivre des sentiers agréablement hitchcockiens qui confirme ce que Ring laissait à penser : Nakata Hideo est un bon artisan classique de la série B qui n’a pas inventé la poudre mais sait bien réutiliser de vieilles recettes pour captiver le spectateur. Le film bascule dans un fascinant chassé-croisé entre le comploteur, celle qu’il recherche et les détectives. SPOILERS Les retournements se multiplient, font repartir le récit à zéro, achèvent de nous convaincre qu’il n’y a ni good guy ni bad guy dans le film, et font l’effet d’une bombe à chaque fois pour le spectateur. FIN SPOILERS Les scènes de nuit sont portées par une magnifique photographie bleue-verte. Hagiwara Masato excelle en comploteur se retournant contre ses patrons et Nakatani Miki en femme manipulatrice. Chaos devient véritablement flippant et captivant, les scènes un peu longuettes du début prennent alors tout leur sens : il s’agissait de prendre son temps pour exposer les personnages et leur caractères, afin que la véritable action soit ressentie de façon d’autant plus intense ensuite. Nakata se permet même des effets de signature à la Ring (les coups de fil flippants) déjà vus mais toujours aussi efficaces.

Chaos confirme le talent de Nakata et prouve qu’alors que les médiocres copies carbone de Ring pullullent sur les écrans nippons il est déjà ailleurs. Dans un cinéma japonais où les révélations sont plus nombreuses qu’à Hong Kong mais où elles n’arrivent pas toujours à confirmer, Chaos est une assez bonne nouvelle.



23 juin 2002
par Ordell Robbie


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