Master Of Ishi-Ban
Le cinéma de Samuel Fuller est une constante remise en question. L'idée chez lui, naît de l'antithèse de la précédente. Bamboo House est l'archétype du film-noir Fullerien, très pointu et tout aussi casse-geule que novateur. Fuller est un auteur Fordien qui a révolutionné le classicisme, de par sa réalisation novatrice. De Ford il possède le sens du cadre et la science des espaces, ... ainsi qu'un oeil unique...
Bamboo House c'est le film-noir typique des années 50, avec sa touche classieuse, l'image travaillée et une mise en scène très "pro" alliant le style au réalisme. Les films-noirs de Fuller comme ceux de Mann, d'Hathaway, Polonksy et consorts sont très violents et sombres.
Bamboo House, propose une intrigue sommaire, une enquête menant un MP interprété par Robert Stack (l'Elliott Ness de la fameuse série Les Incorruptibles) à intégrer un gang de voyous à la solde d'un caïd interprété par l'excellent Robert Ryan (The Wild Bunch, The Tall Men, Bad Day At Black Rock) après l'attaque d'un train japonais ayant causé la mort d'un militaire américain.
Dès le départ on est convié à une visite en bonne et due forme, des merveilles du Japon, avec une attaque de train dans un paysage enneigé avec le Mont Fuji en témoin, d'ailleurs on retrouvera ce point de vue pendant tout le film. D'une porsuite dans les rues de Tokyo, Fuller propose une véritable visite des lieux. Fuller aime les grands espaces et n'a pas de pareil (ne serait-ce que son maître, Mister Ford)pour faire évoluer ses personnages dans les espaces. D'un point de vue purement artistique, on sent immédiatement la touche Fullerienne, faites d'explosion de perspective, d'éclairs de violence, et de surenchère dans les mouvements. Le cinéma de Fuller est en ce sens un cinéma du mouvement, tout son cinéma est véhiculé par l'image. Les dialogues sont souvent platoniques et d'un intérêt limité.
Au-delà de la compléxité des personnages qu'il sait mettre en avant, l'étrange passion que ressent le chef de gang pour le MP qui ira jusqu'au sacrifice, l'ambiguité des personnages principaux naissant de situation surprenantes et complètement à contre-sens de l'idée précédente, tue un peu la bluette qu'il insuffle à contre-coeur et qu'il filme avec laxisme et j'en-foutisme.
Outre une maîtrise évidente de la mise en scène, Fuller sait apporter de la teneur à son intrigue et une très grande profondeur de ses personnages. Le Japon est magnifiquement filmé et Fuller rend une forme détournée d'hommage au cinéma des grands maîtres japonais.