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Manie Manie

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les avis de Cinemasie

5 critiques: 3.9/5

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9 critiques: 3.72/5



Arno Ching-wan 3.75 Anticipations inquiètes et abouties
Astec 4 Un classique à ne pas manquer
drélium 4 Rintaro est magnifique, Kawajiri destructeur et Otomo moqueur. Du culte.
Ghost Dog 3.75 3 magnifiques courts métrages d'animation
Ordell Robbie 4 Brelan d'as
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Un classique à ne pas manquer

Sorti un an avant Akira, le long métrage qui révèlera Otomo au monde, Manie Manie marque un pas essentiel dans l’émergence d’une approche totalement mature de l’animation japonaise. Car les années 80 auront été la décennie de l’affirmation de toute une génération d’auteurs devenus cultes aujourd’hui (Miyazaki, Oshii, Anno...) et qui se sont alloués, à coups de classiques ou de chefs d’œuvres répétés, un espace de création artistique « autonome » d’autant plus remarquable que l’animation, au Japon, est un marché sans commune mesure dans le reste du monde. Et à la différence d’un Spielberg ou d’un Lucas (auteurs « visionnaires » en leur temps), les réalisateurs japonais ne se sont jamais vraiment glissés dans les rôles de « grands manitous » du système, jouant d’un fragile équilibre entre exigences commerciales (il faut que le film marche) et liberté de création.

Pour Manie Manie il semble que seule ait joué la contrainte de création, malgré un investissement important pour un moyen métrage de 50 minutes dont le contenu ne se distingue pas par son potentiel d’exploitation. Ces « histoires labyrinthiques » (Meikyû monogatari) n’ont d’ailleurs pas reçu un accueil mémorable à l’époque de leur sortie, alors qu’elles comptent dans leur liste d’auteurs trois des grands noms de l’animation : K. Otomo, Rintaro et Y. Kawajiri. Au chapitre des explications d’un tel manque de succès on peut avancer, outre le style de matériau (film « d’auteur »), le fait qu’Otomo n’étais pas encore aussi populaire qu’après la sortie d’Akira. Toujours est-il que même s’il n’a pas constitué un tournant commercial majeur de l’industrie, Manie Manie a permis à ses auteurs d’affermir (et d’affirmer) leur talent en toute liberté et avec des moyens conséquents. C’est le cas d’Otomo et de Kawajiri qui n’avaient pas encore réalisé leurs œuvres maîtresses respectives, Akira et Ninja Scroll (même si en tant que mangaka Otomo était déjà reconnu). Pour Rintaro les choses se présentaient de façon légèrement différente puisqu’il possédait déjà un CV très fourni en matière d’animation, remontant à sa collaboration avec Tezuka sur les séries Astro Boy et Le Roi Léo. Hommes de toutes les générations depuis lors, Rintaro comptait à son actif, au moment d’entamer la réalisation de son sketch, nombre de classiques tels que Galaxie Express 999, Kamui, Harmageddon... Plus à l’aise en général avec les univers d’autrui, le réalisateur de Mégalopolis se livre ici à une expérimentation formelle bien éloignée des contraintes de l’adaptation.

Labyrinth laburinthos, segment de Rintaro, ouvre d’ailleurs les festivités (et les conclue). Lorgnant indéniablement (pour son visuel) du côté de l’expressionnisme allemand et du surréalisme façon Salvador Dali, ce sketch se présente comme un rêve éveillé dans un monde étrange et inquiétant où une petite fille du nom de Sachi, accompagnée de son chat Chicherone, déambule en toute tranquillité. Succession de tableaux et de scènes tantôt oniriques, tantôt cauchemardesques (le plus souvent tenant des deux), Labyrinth laburinthos est une plongée dans les dédales de l’esprit de son auteur. Un voyage qui laisse au-delà du fantastique des situations un sentiment d’amère nostalgie et d’apaisement, comme le souvenir d’une enfance révolue, avec son cortège de visions enfouies par le poids du temps, dont on aurait fait le deuil.

Avec Death Circus (L’homme qui court) Y. Kawajiri met en scène un pilote de courses automobiles du futur répondant au nom de Zack Hew. Dans ces épreuves qui tiennent du « stock car » mais en plus violent, rares sont les pilotes à survivre très longtemps au-delà d’une certaine limite. Zack est une exception. Sous la pression et les contraintes de concentration exigées par chacune des ses courses, il a développé une relation symbiotique avec son engin qui lui permet certes de survivre, mais le consume également chaque fois davantage. Kawajiri, fidèle à sa réputation d’auteur sombre, nous délivre une histoire s’inscrivant dans le registre d’un cyberpunk trash dont la thématique fait écho au Tetsuo de Tsukamoto : la fusion organique/métallique. Métaphore du rapport de l’homme à la technologie, le pilote est présenté comme un autiste enfermé en lui-même (sa voiture) embarqué dans une fuite en avant mortelle. Un sketch sous haute tension à la violence accentuée par le trait cassant de Kawajiri, parfaitement adapté à la description de la terrible tension qui habite Zack.

Le troisième segment aborde également le rapport de l’homme à la technologie. Dans L’ordre de stopper la construction, Otomo nous relate l’histoire d’un superviseur de grands travaux qui lors de l’inspection d’un chantier totalement automatisé et perdu en pleine jungle, se fait gentiment kidnapper par les robots ouvriers et ingénieurs. Ces derniers, contre toute attente, ne s’arrêtent plus de travailler et continuent jusqu’à l’absurde une tâche n’ayant plus lieu d’être. Bien qu’Otomo traite son sketch sur le ton de l’humour et de l’ironie, son propos n’est finalement pas plus joyeux que le reste du film. Car derrière l’absurde de la situation affleure une inquiétude sourde : on ne contrôle plus rien, la machine s’est emballée, elle tourne désormais à vide et nous en sommes les otages. On est donc loin de l’approche « asimovienne » du robot et bien plus dans le « syndrome » de Frankenstein, dans la continuité du « monstre » apocalyptique Testuo du manga Akira.

Esthétiquement varié, chaque sketch possédant son identité graphique bien propre, Manie Manie n’en garde pas moins une certaine cohérence thématique. Ainsi peut on remarquer la symétrie des rapports entre les trois sketches : d’un côté les labyrinthes de l’esprit (Rintaro), de l’autre ceux de la matière (Otomo) et au milieu la fusion des deux (Kawajiri). Chose logique puisqu’une partie du staff se retrouve dans les crédits des trois sketches, notamment Taku Mayumura à qui l’on doit les trois histoires originales. Une œuvre qui se regarde entre deux films « détentes » de préférence, histoire de bien digérer l’inquiétude et le malaise qu’elle véhicule, mais une œuvre qui se regarde absolument.



06 février 2002
par Astec




3 magnifiques courts métrages d'animation

LABYRINTHE (de Rintaro) : Un joli rêve de 13 minutes où l’on suit une petite fille et son chat à travers un labyrinthe, guidés par un clown blanc sautillant. Techniquement et artistiquement, c’est du grand art. Dommage que ça ne dure pas plus longtemps.

L’HOMME QUI COURAIT (de Yoshiaki Kawajiri) : On passe maintenant au cauchemar, d’une durée égale au rêve mis en scène par Rintaro, et cette fois-ci dirigé par le réalisateur talentueux de Ninja Scroll. Il s’agit de l’épopée tragique d’un pilote de course du futur, Zack-la-mort, si doué au volant de sa voiture au moteur de fusée qu’il est invaincu depuis des lustres. Jusqu’au jour où il pète les plombs et repousse les limites de son corps au maximum en refusant de s’arrêter après la ligne d’arrivée. Ce corps va le lâcher en même temps que sa mécanique…

ARRETEZ LES TRAVAUX ! (de Katsuhiro Otomo) : Seconde vision de cauchemar sur les 3 courts métrages, signé du réalisateur de Akira. Ici, tout est robotisé à outrance, à tel point qu’un seul homme, qui ne doit que vérifier, est nécessaire à des travaux de construction gigantesques. Tout est automatisé, géré par des robots. Sauf que lorsqu’un dysfonctionnement survient, c’est la catastrophe… Les robots sont surmenés et stressés par la charge de travail et le retard, et certains tombent en panne puis explosent. Les travaux en eux-mêmes ressemblent à tout excepté le projet initial… En viendra-t-on à cette situation un jour ou l’autre ? Fera-t-on travailler les robots de façon autonome ? On ne peut pas le prédire, mais cette vision de l’avenir fout les jetons.



08 février 2001
par Ghost Dog


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