Big Nak
En attendant l'éventuel futur investissement de Disney dans l'animation thaïlandaise bredouillante (après la Chine et l'Inde, dont les respectifs produits locaux "Magic Gourd" et "Romeo" n'ont pas été des francs succès), la surpuissante société de production Sahamongkol Films prend le pari risqué de mettre ses propres billes dans plusieurs projets. Après un "Khan Kluay" franchement réussi, au tour de l'adaptation de la plus célèbre des fantômes thaïlandais de pointer son bout de nez à l'écran: Nak.
Pas question de reservir une énième resucée de la plus célèbre des légendes du pays du sourire, surtout que "Nak" est entièrement façonné au plus petit public; de l'histoire originale, il ne reste plus guère que le personnage principal et encore: singulièrement rajeuni et – surtout – ragaillardie et faite "gentille" pour assister une petite fille humaine à délivrer son petit frère des griffes d'un vil méchant dans un monde parallèle. Pour les assister, les deux filles vont être flanquées par une galerie de truculents personnages, dont Keaw, un lointain cousin de Shrek de par sa couleur verte, qui sert de side-kick comique en déblatérant des blagues à en "perdre la tête" (il est un "headless ghost"). Doublé dans sa version originale par "Mum" Jok Mom, l'effet humoristique est garanti, même si des très nombreux jeux de mots se perdent une nouvelle fois à la traduction approximative (et pour la plupart intraduisibles).
Thonk ressemble à s'y méprendre au chien de l'inspecteur gadget et fait preuve d'au moins autant de sagesse, même s'il prend souvent sa queue entre ses jambes, quand ça chauffe dans les parages. Enfin, Euot est une sorte de géant bleu, lointain ascendant du bon Djinn du disneyen "Aladdin"; bref, une équipée réussie, qui a le mérite de brasser large pour satisfaire plusieurs tranches d'âge à la fois.
L'histoire n'a donc plus rien à voir avec la légende originale – quoique ! Car derrière une trame relativement simple d'un combat du Bien contre le Mal, les auteurs n'oublient pas pour autant leur matériau original en insufflant une curieuse sous-intrigue en rapport étroit avec la légende originale…et qui revient notamment sur les origines de Nak.
Mais le morceau de choix est sans aucun doute constitué par la Némesis de Nak: le portrait animé d'une Sadako au plus fort de sa forme. En fait, le petit frère de Gam, Thee, est enlevé alors que des villageois assistent à la projection d'un film de fantômes à l'air libre et "à l'ancienne", soit avec deux "doubleurs" assis en cabine à l'arrière de l'assemblée pour commenter le film et doubler tous les personnages…jusqu'au moment, où cette Sadako "sort" de l'écran pour semer la pagaille. La suite inclut des nombreux combats entre Nak et Sadako…où quand le bestiaire fantastique thaï s'en prend à celui de son ennemi juré (la Seconde Guerre Mondiale a laissé de profondes traces) depuis toujours pour réclamer la bonen place qui lui est dû (le fantastique a depuis toujours occupé une place très importante au sein de la cinématographie thaïlandaise).
Côté animation, il y a des sauts de qualité surprenants à l'écran et oscille entre le correct et le franchement torché. Parfois totalement inexpressifs, les personnages sont, à d'autres moments, très soignés et même entourés d'un halo noir leur donnant un quasi relief 3D pour se détacher des décors. Il y a des très nombreuses séquences d'action, dont une apocalyptique (tout reste relatif) final d'une bonne vingtaine de minutes assez bien foutue; l'ensemble ressemble quand même bien plus à un épisode de la télévision et reste très en-deçà des actuels standards mondiaux et du niveau de "Khan Kluay".
A noter la sympathique musique (dont une très belle chanson-titre) de Boyd Kosiyabong.
Un divertissement très mignon, peut-être pas pour les tout-petits, mais en tout cas pour les éternels enfants.