drélium | 4.25 | Un grand fleuron méconnu de la sorcellerie et de l'horreur HK. |
Une production Shaw Brothers de Wong Ka Hee derrière les fagots sent en général assez bon pour l'amateur de folie. Lorsqu'on sait que le film est une référence de la mouvance horreur, érotisme et sorcellerie pré cat III réalisée pendant la période la plus fertile et créative du genre, il n'y a déjà plus à hésiter. Mais quand tout en crescendo, le film va finalement encore plus loin qu'espéré dans la surenchère ténébreuse, c'est assez rare pour l'acclamer sans réserve en dépit de ses faiblesses cinématographiques évidentes.
Après un premier quart d'heure d'érotisme bas de plafond entre deux amants gourmands où Norman Chu en profite entre deux films martiaux (le coquin), et Maria Jo nous montre son corps de rêve, le couple fraichement consommé se dispute et la jeune amante atterrit bientôt dans la nature ou deux voyous vont joyeusement lui remonter le moral jusqu'à la laisser choir du haut d'un manoir lugubre. S'en suit une enquête un poil longuet ponctuée néanmoins par un Philip Ko sombre et haineux en train de latter du voyou pour le bonheur du spectateur. Mais la force physique de Ko ne fait pas tout loin de là. Pour radicaliser un peu le propos, il va demander l'aide d'un sorcier qui décide d'utiliser le corps de Maria comme une arme de possession, en bref la bonne idée qui va sensiblement dynamiter la seconde moitié du métrage et ce jusqu'au final. D'autant que l'érotisme vient à nouveau se mêler aux maléfices et autres incantations occultes tandis que Norman en appelle à un exorciste taoïste pour s'interposer alors que les deux voyous font de même pour couronner le tout, avec une prêtresse bientôt possédée à son tour par le défunt esprit. Et c'est loin de s'arrêter là. Bref, Black Magic peut une nouvelle fois aller se coucher malgré tout le respect qui lui est dû.
Au contraire des nombreuses productions Shaw de sorcellerie tel que les Black Magic trop bis, Hex trop sage ou autre Sex beyond the grave trop nanar pour convaincre totalement, Seeding of a ghost empreinte gaiement aux cartons occidentaux de l'horreur, Carpenter et Scott en tête, et y mêle la magie chinoise avec une insouciance et un brio macabre indéniable. Au delà de son aspect fauché, Seeding of a ghost propose déjà 1 ou 2 bonnes petites bastons bien rugueuses pour commencer, un cuillerée d'érotisme ensuite, et surtout, un scénario simple mais sérieusement mené et une atmosphère de plus en plus pesante colorée de prières occultes, de cadavres décrépis, de gerbe d'asticots et de cervelle ingurgitée qui font nettement la différence. La caméra sobre et glauque tout comme les effets spéciaux certes rudimentaires mais efficaces, la photo travaillée, la mise en scène et la musique, oppressantes, permettent une très bonne ambiance des profondeurs occultes qui ravira l'amateur.
Malgré son lot de poncifs scénaristiques bien cadrés, le charme typiquement dégueu opère et façonne un solide socle à la vague hongkongaise pas franchement finaude mais jouissive qui déferle à cette époque. La deuxième moitié du métrage est à ce propos exemplaire et concurrence même sérieusement sur certains points, à mon humble avis, la vague italienne menée par Fulci et autre Romero, notamment par un rythme des plus soutenu qui ne daigne pas lâcher du leste d'étrangeté. Là où beaucoup de cousins HK laisse traîner un brin de comédie et mènent irrémédiablement vers une folle confrontation finale entre sorciers du bien et du mal, Seeding of a ghost ne s'arrête pas là et franchit un pas décisif vers le "Thing" show poussé par l'esprit vengeur de Philip Ko. Pas un brin de comédie ne vient de surcroît minimiser la noirceur générale, enveloppant le film d'une chappe occulte de bout en bout.
Je soutiens donc Seeding of a ghost sans réserve et appelle le curieux à se ruer dessus. Quant aux autres : passez outre les faiblesses techniques et scénaristiques et appréciez plutôt l'ambiance déviante, le vrai climat d'angoisse et le spectacle sans mesure que nous offre Philip Ko, Norman Chu et le réalisateur Yeung Kuen, habitué totalement méconnu des films glauques des profondeurs (Bloody Beast), tous trois très envieux d'en mettre un bon coup dans la face du pèlerin en quête de diamants. A découvrir en priorité aux côtés de Boxer's Omen bien plus déluré encore quant à lui.