Langue de pute
On ne peut être que déçu par ce trop bref documentaire sur l'immense réalisateur qu'a été Imamura Shohei; et pourtant le pionnier de la Nouvelle Vague portugaise, Paulo Rocha, déborde d'imagination pour faire parler le cinéaste dans les endroits les plus à même de lui soutirer des renseignements et filmés en un hommage appuyé aux films même du metteur en scène.
Soit un troquet typique du Japon d'antan (patronne incluse), où Imamura se remémore avec un plaisir non dissimulé maints plaisirs en compagne de son comédien fétiche Kitamura Kazuo – jusqu'à tomber de la chaise de fatigue (et d'alcool); ou alors un salon de coiffure (bien avant "L'Anguille", mais en bel hommage aux "Pornographes"), où Imamura lâche l'anecdote la plus croustillante sur un parrain yakuza surnommé "le Kurosawa du pinku eiga" (à l'impressionnant arsenal de stock-shots de fiers membres d'hommes pour pallier aux éventuelles déficiences de ses acteurs principaux); ou une bibliothèque, où le cinéaste se replie tel un escargot effrayé dans sa coquille, quelque peu "brusqué" par les questions fusionnantes de l'énergique Catherine Cadou ayant tant fait pour le cinéma japonais au cours de ces dernières décennies. Et de finir dans un cimetière des prostituées anonymes et d'y enterrer le cadavre d'un scénario, qu'il n'aura jamais eu l'occasion de tourner (co-écrit avec son fils Daisuke Tengan sur les amours d'un adolescent pour une prostituée).
Le tour est terminé, le réalisateur tourne le dos à l'audience – mais contrairement à la fin du tournage du documentaire, suite auquel les dernières pièces clefs de sa belle œuvre restaient encore à venir, il est depuis parti pour des bons…Sayonara, maestro!