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Difficile de critiquer cette œuvre, monstrueusement charcutée, car malheureusement il ne subsiste plus qu'une version de près de 70 minutes dans une condition assez épouvantable du film initial de plus de deux heures. Un pamphlet politique incroyablement profond, dont la portée a vite fait d'effrayer les censeurs de l'époque et les a décidés de couper plus de 50 minutes du film…
Pour resituer le film dans son contexte, il faut se rappeler que Hong Kong était en pleine expansion économique à l'époque; mais il demeurait un géant aux pieds d'argile, notamment menacé par les troubles politiques chinois de 1968…
Transposée dans l'ancien archipel britannique, "La Peste" de Camus prend des significations fortes et nombreuses…Il est tout simplement incroyable de constater les nombreuses couches de lecture et on n'ose s'imaginer, ce dont Kong avait dû encore traiter à l'époque. Reste d'impressionnantes scènes de panique parmi des foules, tout comme des portraits plus pointus d'une poignée d'individus aux destins variés (et bien loin des clichetons actuels des gros films catastrophes américains notamment, sans parler du fait que la terrible épidémie ne va pas épargner grand monde, enfants et femmes compris) et des mises en situation criantes de vérité.
Un chef-d'œuvre, bien plus marquant encore qu'un "Don't play wih fire" de Tsui Hark dans une même portée contestataire, qu'il est malheureux de ne plus voir entier (seul le scénario original peut encore être consulté aux Archives du Film de Hong Kong ou alors à demander à un Patrick Kong extrêmement ému à l'évocation de ce film de vous raconter les scènes manquantes); un film d'une portée quasi visionnaire, plus de 40 avant la terrible vague de SRAS et l'incapacité des autorités à avoir su faire face.
Ah – quant à la fin surprenante et sans aucun doute contestable pour la plupart des spectateurs, elle s'inscrit pourtant dans une thématique (et une conviction) bien ancrée dans toute la filmographie du réalisateur et n'en demeure que plus sincère dans sa démarche.
